PALAZZI DI L'AMERICANI 2 : Notre-Dame de Guadalupe

 

De retour de leur lointain exil, les "Américains" de Corse ont laissé de multiples traces dans l'île (voir notre page sur l'exposition de Corte Palazzi di l'Americani.) Certains ont aussi "transporté" jusque dans l'île des dévotions qu'ils avaient connues aux Amériques.

 

Parlons de Notre-Dame de Guadalupe dont nous avons rencontré des effigies dans quelques églises. Au Mexique, c'est l'équivalent de Lourdes pour nous.

 

C'est une histoire d'apparition et elle se passe en 1531 sur le mont Tepeyac, près de Mexico : la Vierge sous des traits métissés apparaît plusieurs fois à un indigène, Juan Diego, pour demander que lui soit érigée une église en ce lieu. Miracle des roses, en pleine saison sèche, miracle du manteau de l'homme soudain recouvert d'étoiles et décoré de l'image de la Vierge. Et cela à peine 10 ans après l'arrivée de Cortès.

 

La légende est  sans doute d'origine espagnole : l'image miraculeuse d'une vierge noire (morena) aurait été trouvée près du fleuve Guadalupe à Cacérès, en Extrémadure, une image "achéiropoiète" (non faite de main d'homme comme le suaire de Turin par exemple). Un magnifique monastère gothique y est édifié au XIVè s.

 

 

 

 

ND de Guadalupe est déclarée patronne des Amériques par les Rois Catholiques ; sa bannière est brandie par  Hernàn Cortès lors de la conquête du Mexique sous Charles-Quint, juste avant de massacrer les Aztèques ou les réduire en esclavage ... Lui-même étant originaire d'Extrémadure, il a dû contribuer à l'essor de ce culte.

 

Quant à Christophe Colomb, c'est au sanctuaire de ND de Guadelupe qu'il alla en pèlerinage après sa découverte de 1492 ; et c'est ainsi qu'il appela une des îles qu'il découvrit lors de son deuxième voyage ... la Guadeloupe.

 

Quoi qu'il en soit, au Mexique, le culte est né et grandit de façon fulgurante. Un premier sanctuaire est construit par les Espagnols, peu après l'apparition. Et ce n'est après cette apparition que les indigènes se convertirent en masse. Il semblerait qu'avant cela, les missionnaires n'avaient pas eu trop de succès.

 

L'effigie de la Vierge de Guadalupe devient plus tard l'étendard des rebelles contre Joseph Bonaparte puis celui de l'armée de Zapata.

 

Aujourd'hui l'église de ND de Guadalupe de Mexico est la plus fréquentée au monde après le Vatican et avec Notre-Dame de Paris et la célébration de la Vierge le 12 décembre déplace des foules énormes.

 

 

 

 

Quand les papes se déplacent, c'est un passage obligé. Jean-Paul II fait d'elle la patronne des Amériques.

 

 

 

L'iconographie de la Vierge de Guadalupe est celle du chapitre XII de l'Apocalypse : la Vierge se dresse sur un croissant de lune, soutenue par un ange, en position d'orante et entourée d'une mandorle d'or.

 

Elle porte une ceinture, signe de maternité.

 

 

 

Le manteau qui l'enveloppe est semé d'étoiles qui reproduisent -dit-on- les 46 constellations les plus brillantes que l'on peut voir dans le ciel de Mexico et aussi le nombre d'années qui ont été nécessaires pour construire le temple de Jérusalem.

 


 

 

Parfois métissée, la Vierge de Guadalupe trouve ses origines dans les mythes aztèques comme chrétiens, bel exemple de syncrétisme religieux.

 

Ainsi, le serpent qu'elle écrase sous ses pieds est aussi bien celui de la Bible que le serpent mythique des Aztèques Quetzalcoatl. Les rayons d'or qui l'entourent figurent le dieu aztèque du soleil.

 

L'ange qui la porte a des ailes d'oiseau aztèque divin. Il paraît aussi que sur la colline des apparitions, se dressait un ancien sanctuaire aztèque. 

 

 

Florence Chiesa degli Ognissanti
Florence Chiesa degli Ognissanti

Cette photo prise en 2018 souligne la pérennité et la diffusion du culte de ND de Guadalupe.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dans l'exposition Palazzi di l'Americani encore visible à Corte jusque en décembre 2017, un magnifique tableau de Nuestra Senora  de Guadalupe, rapporté du Mexique par Carlo Ferdinandi, accueille le visiteur.

 

Le métissage de la vierge est ici bien visible.

 

Les tableautins retracent les principales étapes des apparitions. En bas une vue du sanctuaire.

Pedro Lopez Calderon 1722 coll.part. Marchetti Marseille
Pedro Lopez Calderon 1722 coll.part. Marchetti Marseille

 

 

On peut lire sur cette huile sur cuivre les premiers versets du ch. XII de l'Apocalypse de Saint Jean : Signum magnum apparuit in coelo. Mulier amicta sole et luna sub pedibus ejus : un signe grandiose apparut dans le ciel ; une femme ayant le soleil pour manteau, la lune sous les pieds (...)

 

Au pied de la Vierge : Non fecit taliter omni nationi sed mexicanae soli : les premiers mots sont tirés du Psaume 147 attribué à David. On peut traduire par : (l'Eternel) n'a pas traité ainsi toutes les nations (...) mais seulement le Mexique. Cette phrase figure sur toutes les répliques de ND de Guadalupe.

 

Elle aurait été prononcée par le pape Benoit XIV à qui un prêtre jésuite aurait rapporté du Mexique en 1754 un tableau de la Vierge de Guadalupe. Dès lors le pape désigna ND de Guadalupe comme sainte patronne de Mexico, ajoutant la dimension patriotique au fait religieux.

 

Juste au-dessous : la signature de l'artiste Pedro Lopez Calderon.

 

 

En Corse voici quelques images de "Lupa", Lupita" comme la surnomment parfois les Mexicains avec ferveur et familiarité.

 

Pas de grandes oeuvres, des chromos pour la plupart. Un travail d'archives permettrait sans doute de comprendre le pourquoi de la présence de cette Vierge "exotique" dans nos églises.

 

Les Américains peut-être, des religieux, les Jésuites ? Ou simple manifestation de la dévotion aux apparitions de la Vierge : Lourdes, Fatima, la Salette etc. qu'on rencontre dans l'île.